novembre-décembre 2016

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édito

L’Église et la question de demain

Que réservent demain et après-demain à une Église catholique en perte d’influence, y compris sur « ses » terres de l’Ouest, mais toujours en capacité de mobiliser ? Pour esquisser cet avenir et offrir des pistes de réflexion, Place publique a choisi de regarder l’histoire et d’établir un état des lieux aussi précis et panoramique que possible de ce que sont l’Église et les pratiques religieuses aujourd’hui.

Jean-Paul James, évêque du diocèse de Nantes en convient: l’Église rencontre des difficultés et l’homme de chiffres et de statistiques qu’il fut durant huit années à l’Insee ne peut que constater la baisse des vocations, un clergé vieillissant, les mariages divisés par deux en vingt ans, le nombre de baptêmes qui se réduit… Dans l’entretien accordé à la revue, l’évêque tempère également ces difficultés: qui aujourd’hui en France peut prétendre rassembler chaque semaine autant de fidèles que l’Église? Et il plaide pour que l’institution, plutôt que de se refermer sur elle-même, au contraire s’ouvre sur l’extérieur et, solide sur ce qu’elle croit et les idées claires, engage le dialogue et débatte.

Après cet entretien, un abécédaire réalisé collectivement et au menu copieux (trente-quatre pages au total), débutant par «
Action catholique» et s’achevant par «Zouaves» éclaire aussi bien l’histoire de l’Église en Loire-Atlantique qu’il dresse un état des lieux de ce qu’elle est aujourd’hui, précisant également le sens de ce que recouvrent certains termes du vocabulaire religieux.

Complément de cet abécédaire, l’historien Didier Guyvarc’h a examiné les bulletins de plusieurs paroisses nantaises publiés dans l’entre-deux-guerres mondiales
: le récit et la mise en perspective de ces lectures montrent combien l’Église déployait des stratégies pour encadrer la vie de ses fidèles, des plus jeunes aux plus âgés.

Un prêtre venu du Bénin, un couple qui a fait le choix de la rupture, un patron qui a la foi, une ancienne porte-parole de la Manif pour tous, un philosophe, un séminariste, René Martin, le fondateur de la Folle journée… Il n’y a rien de scientifique dans la série de portraits de catholiques – ou d’ex-catholiques pour l’un d’eux – que nous publions, travail collectif du comité de rédaction. Nous avons d’abord souhaité illustrer la diversité de cette communauté et des parcours. Car que peut-il y avoir de commun entre France de Lantivy, une des animatrices de la Manif pour tous en Loire-Atlantique et Monique Rabin, députée socialiste et «
catho de gauche», qui a défendu avec ténacité dans sa circonscription le Mariage pour tous? Ces portraits nous indiquent combien les voix sont multiples au sein de la communauté catholique.
L’enseignement catholique garde une place prépondérante dans le département. Juliette Mengneau, qui prépare une thèse sur le pouvoir politique et l’enseignement privé dans les Pays de la Loire, raconte comment un partenariat durable s’est installé et rappelle que voilà trente-cinq ans, après l’élection à la présidence de la République de François Mitterrand, une guerre scolaire s’était déclenchée, Nantes connaissant des manifestations monstres aussi bien des défenseurs de l’école catholique que des partisans de l’école publique.

Le mouvement intégriste a depuis longtemps su faire entendre sa voix à Nantes et dans la région
: il dispose d’églises, d’écoles, d’associations… Le journaliste Joël Bigorgne qui travaille depuis plusieurs années à une enquête sur les mouvements qui composent cette galaxie, nous présente cette famille recomposée, détaillant les querelles et les enjeux.

Regardons vers demain
: le sociologue Charles Suaud nous offre des pistes pour penser le devenir des églises. Il souligne également qu’à défaut de cette réflexion, le risque est grand de voir des églises restaurées… mais vides. À propos de restauration, Jacques Dabreteau qui a suivi ces dossiers lorsqu’il travaillait pour la Ville de Nantes, détaille la longue restauration de la basilique Saint-Nicolas qui a duré dix-huit ans.

Ce dossier se referme avec une «
vigie», Jean Delumeau, le grand historien des mentalités religieuses – il en a occupé la chaire durant vingt ans au Collège de France. Dans cet entretien réalisé par Thierry Guidet, Jean Delumeau précise d’abord qu’il convient de ne pas surévaluer le rôle que le christianisme a pu tenir et que par conséquent, il ne faut pas tirer aujourd’hui de conclusions hâtives quant à sa disparition: «Son message religieux reste d’une brûlante actualité, cette bonne nouvelle d’un Père qui nous aime, nous appelle au pardon mutuel et nous ouvre les portes du royaume des cieux. En quoi et pourquoi une telle espérance serait-elle passée de mode?»